mercredi 16 janvier 2013

Interview

Albert Damantang Camara, ministre de l’emploi, de l’enseignement technique et de la formation professionnelle
Monsieur le Ministre, vous êtes l’un des porte-étendards de la jeunesse, depuis votre arrivée dans ce département quelles sont les innovations que vous avez apportées ?
Damantang Camara : Je voudrais d’abord rappeler que le secteur de la formation technique et professionnelle constitue un levier incontournable pour le développement socio-économique d’une Nation, particulièrement d’un pays sous développé. A ce titre il a toujours figuré parmi les préoccupations des différents régimes qui se sont succédés en Guinée, avec malheureusement, des fortunes diverses.
C’est à partir de 1996, que la 2ème République a ressuscité le secteur en créant le Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle qui constitue un des meilleurs moyens de lutte contre le chômage, donc de lutte contre la pauvreté. Cette approche a été davantage renforcée par la 3ème République, qui, tenant compte de l’importance des enjeux qui se dessinent pour les prochaines années, notamment dans les secteurs de l’agriculture, des mines, de l’industrie, y  a adjoint l’emploi.
En prenant donc en charge cet important secteur, et aux fins d’une bonne appropriation de ses problèmes, j’ai d’abord effectué un périple dans toutes les institutions de formation technique et professionnelle du pays. Cette opération a permis de faire un exhaustif état des lieux qui a débouché sur quelques innovations : La restructuration du Ministère par la création, entre autres, des Directions régionales de l’emploi, de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle dans les Chefs lieux de Gouvernorat afin de permettre, d’une part de rapprocher davantage le Ministère du public cible que constituent les élèves et les parents d’élèves, et d’autre part de faire la promotion de cet important secteur d’enseignement, porteur d’emplois pour la jeunesse, auprès des populations. L’évaluation des besoins de main d’œuvre du secteur minier et industriel, grâce aux concertations entre les différents acteurs publics et privés du secteur des mines dans le cadre du partenariat public/privé. Cette opération a permis d’évaluer les besoins potentiels en main d’œuvre à 52 000 personnes pour la construction pendant 6 ans.
La Mise en place de nouveaux dispositifs de formation sur financement de l’AFD qui a permis une étude de faisabilité des dispositifs de formation technique en   appui au développement du secteur industriel et minier en Guinée, et un montage opérationnel de partenariat public/privé, appelé Projet FORMINES qui a rompu avec l’absence d’une politique d’implication d’autres partenaires sociaux, tel le secteur privé dans le financement de l’enseignement professionnel. L’organisation des Salons de l'emploi en partenariat avec le Ministère de la Jeunesse et de l’Emploi Jeunes et le Forum des Jeunes de Guinée (FOJEG) à N’Nzérékoré, Kankan, Labé, Boké et Conakry. Ces Salons qui ont mobilisé industriels et miniers, futurs pourvoyeurs d’emplois, ont abouti, entres autres, au montage d’un projet de réalisation de 21 maisons de l’emploi comme centres d’information sur le marché de l’emploi pour les entreprises et les demandeurs d’emploi.
L’organisation de la Table Ronde sur ‘’l'enseignement technique et la formation professionnelle, au service de l'emploi et du développement’’, du 08 au 10 juin 2011 sous la haute présidence du Chef de l’État, qui a adopté une nouvelle Lettre de politique de développement de l'Emploi, de l'Enseignement Technique et de la formation Professionnelle contenant de nouveaux objectifs stratégiques, davantage adaptés aux réalités spécifiques de chaque localité de notre pays, et aux besoins des partenaires sociaux et des entreprises.
L’extension du Dispositif Post primaire (Formation de courte durée) qui, à moyen et long termes; va créer des filières de formation professionnelle de courte durée visant l’insertion professionnelle de 20% des sortants du primaire n’intégrant pas le collège en 2015 et 30% des sortants du collège n’intégrant pas le lycée en 2015.
Est-ce que nos écoles professionnelles sont en adéquation avec la réalité du marché de l’emploi ?
Le Département de l’Emploi, de l’Enseignement Technique et de la formation Professionnelle développe 70 filières dans  46 corps de métier au niveau de ses 105 institutions de formation publiques et privées, pour les secteurs primaire, secondaire et tertiaire. Mais avec l’émergence de nouveaux corps de métier, notamment dans les mines, l’industrie, les nouvelles technologies de l’information et de la communication…, il y a malheureusement inadéquation avec la réalité du marché de l’emploi. C’est pourquoi, le secteur de l’Emploi, de l’Enseignement Technique et de la formation Professionnelle se doit avant tout, de définir et mettre en place une véritable politique de formation de ressources humaines, en rapport avec les besoins du marché de l’emploi, en tenant compte de l'émergence de nouveaux emplois liés au développement des secteurs prioritaires du Gouvernement notamment les secteurs agricole, minier et industriel.
Avez-vous une idée de la statistique en matière de l’employabilité depuis votre arrivée ?
Pour augmenter le taux d’employabilité en Guinée, le Ministère de l’Emploi, de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, à travers sa structure spécialisée qu’est l’Agence guinéenne pour la promotion de l’emploi (AGUIPE), a pour autres missions , de créer les meilleures conditions favorables aux demandeurs d’emploi. Conséquemment, ce sont des milliers de jeunes primo demandeurs d’emploi qui viennent s’inscrire aujourd’hui à l’AGUIPE, pour bénéficier de ses conseils, avis et soutiens. C’est ainsi que plus de 500 jeunes cadres financiers recrutés par l’AGUIPE ont été formés aux techniques administratives et financières par le CNPG. Dans le même temps, plus de 2000 jeunes primo-demandeurs d’emploi ont été initiés à l’informatique et aux techniques de recherche d’emploi. A ce jour, ce sont 13500 demandeurs d’emploi qui sont inscrits à l’AGUIPE.
Comment comptez-vous qualifier la formation professionnelle ?
La déclaration solennelle du Président de la République, à l’occasion de la Table ronde sur l’EET-FP (8-10/6/2011), faisant du secteur de l’Emploi, de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, sa deuxième priorité après l’éducation de base, constitue déjà un véritable tremplin devant assurer la qualification de la formation professionnelle et technique. Dans la foulée, j’ai engagé une série d’opérations de lobbying,  à travers de nombreux contacts avec des partenaires techniques et financiers (institutions internationales et représentants de pays amis, etc.), les représentants et responsables des sociétés minières, et la Chambre des mines, pour présenter et vendre le projet Formines qui prévoit, entre autres : de mettre en place des dispositifs qui permettront d'améliorer le niveau de financement du secteur, grâce à une meilleure implication de tous les acteurs et partenaires nationaux et étrangers, de construire un véritable partenariat, entre d'une part les intervenants et les   acteurs du secteur, à savoir les élèves, les parents d'élèves, la communauté locale et les  employeurs, et d'autre part le Gouvernement et ses principaux partenaires techniques et financiers, promouvoir une meilleure gouvernance et un pilotage du système à travers le renforcement des capacités institutionnelles, humaines et une gestion axée sur les résultats, de prévoir la mise en place d’un dispositif de formation technique et professionnelle solide et de qualité, basé essentiellement sur l’approche par compétence (APC), en vue de donner le maximum d’habiletés à nos apprenants favorisant ainsi leur future insertion socioprofessionnelle.
Toutes ces dispositions permettront la qualification de la formation des formateurs, la mise à disposition des institutions de formation des équipements conséquents et des matières d’œuvre et déboucher conséquemment sur la qualification de la formation technique et professionnelle.
Quelles vos axes prioritaires ?
Le gouvernement, pleinement conscient du fait qu’une bonne formation professionnelle et technique donnée aux jeunes leur permet à coup sûr de s’insérer dans la vie active, a lancé une vaste opération de développement du secteur, en offrant aux jeunes scolarisés, déscolarisés et non scolarisés des opportunités de s’orienter plus facilement vers ce secteur. Cette opération, à terme, permettra de renverser la pyramide professionnelle en faveur des cadres moyens qui constituent les véritables acteurs de la construction d’un pays
Aussi, la redynamisation de l’emploi, de l’enseignement technique et de la formation professionnelle qui est incontournable, est ainsi tributaire de la réalisation de certains axes prioritaires que sont : le marketing et le partenariat ; le développement des programmes et filières de formation ; la construction des infrastructures et la mise à disposition des équipements et des matières d’œuvre idoines ; la formation des personnels enseignants et non enseignants, eu égard au vieillissement dans le secteur ; la formation et l’insertion professionnelle des apprenants ; le renforcement des capacités institutionnelles et organisationnelles ; la promotion de l’enseignement technique et professionnel privé ; l’appui au secteur informel et la modernisation de l’apprentissage.
Quelles sont vos perspectives ?
La mission première confiée au Département de l’Emploi, l’Enseignement technique et de la Formation Professionnelle par le Président de la République, est d’assurer la formation technique et professionnelle du jeune guinéen afin de lui permettre une rapide et efficace insertion socioprofessionnelle. Pour atteindre cet objectif qui participe à la réduction du taux de chômage chez les jeunes, le Ministère, entre autres : Continuera d’animer le lobbying qu’il a engagé au niveau des bailleurs de fonds intérieurs et extérieurs, avec l’appui du Ministère de la Coopération, aux fins d’amener les partenaires techniques et financiers à construire, rénover et équiper des infrastructures, réviser et implanter de nouveaux programmes avec des contenus de formation plus porteurs, mieux adaptés aux réalités économiques de nos régions et davantage tournés vers les nouvelles technologies, développera le partenariat avec les institutions et ONG nationales, à l’image des accords de partenariat signés avec le Comité Miss Guinée (COMIGUI) et le Forum des Educatrices de Guinée (FEG-FAWE) pour inciter les jeunes filles/femmes à s’orienter vers l’EET-FP, afin d’augmenter ses capacités d’accueil, a réactualisé l’étude de faisabilité réalisée par SONED Afrique pour permettre la construction et l’équipement de huit (8) Ecoles régionales des Arts et métiers (ERAM) au niveau de Conakry et des 7 Gouvernorats de l’intérieur, et poursuivra les démarches engagées auprès des autorités compétentes pour la construction d’amphithéâtres au niveau de  huit (8) grands Centres de Formation Professionnelle
Votre dernier mot ?
D’abord rappeler aux jeunes que le secteur de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, étant une solution idoine pour réduire le chômage et la pauvreté en Guinée, il constitue conséquemment un véritable tremplin du développement socio-économique de la Guinée, et surtout un meilleur vecteur d’insertion socioprofessionnelle de la jeunesse.  On ne décrète pas l’emploi, on accroit l’employabilité en donnant des compétences requises aux jeunes dans les institutions de formation technique et professionnelle, pour qu’ils se vendent sur le marché de l’emploi. Enfin, et c’est l’évidence même, le jeune inscrit et formé à l’enseignement technique et professionnel est sûr d’être utile à lui-même, à sa communauté et au pays entier.
Source : GBENGBETA’’

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